Liban - Télécoms Professionnels et associations continuent de s'insurger contre le retard dans l'installation d'une technologie aux nombreux avantages économiques.
Depuis sa création en octobre dernier, le Lebanese Broadband Stakeholders Group (LBSG), un groupe de professionnels représentant plusieurs secteurs économiques, ne cesse de lancer des appels pressants en faveur de l'installation au Liban du Broadband, une technologie indispensable à l'essor économique du pays. Hier même, une table ronde réunissant plusieurs membres du groupe ainsi que des responsables du secteur privé a été organisée afin de débattre du sujet et de mettre l'accent sur l'importance cruciale de cette technologie pour le développement économique et social du pays.
Souvent confondu avec l'Internet haut débit (présent aujourd'hui dans quelques régions du Liban), le Broadband est en effet un réseau jouissant d'une large bande passante regroupant l'ensemble des technologies permettant un débit rapide, qu'il s'agisse du WiMax, de la fibre optique, ou d'une autre configuration. Sa mise en place au Liban semble toutefois retardée par des facteurs plus politiques qu'économiques. L'enjeu est pourtant de taille. « Non seulement ce réseau permet de contribuer au développement de secteurs déjà existants, comme celui des médias, de la santé, ou de la publicité, mais aussi à l'éclosion de nouveaux segments économiques, tels que les centres d'appels ou les centres de données », a ainsi martelé Gabriel Deek, président de la Professional Computer Association (PCA), déplorant en parallèle la précarité du service offert à l'heure actuelle sur le marché, sous le nom d'Internet haut débit. « La vitesse maximale disponible aujourd'hui s'élève en effet à moins de 2 mégabits par seconde. Or, pour assurer une connexion efficace entre le siège central d'une banque et une agence, par exemple, il faut au moins une vitesse de 10 mégabits par seconde. Le développement de certains secteurs nécessite en outre plusieurs centaines de mégabits », a-t-il expliqué.
Avec aujourd'hui une capacité globale de seulement 600 mégabits, contre 24 000 en Estonie, selon les participants à la table ronde, le Liban souffre en effet d'une insuffisance au niveau de la « production », l'empêchant de répondre à tous ses besoins. Cette faible capacité est due notamment à l'absence d'infrastructure adéquate mais aussi à une structure de marché oligopolistique menant, par ailleurs, à des prix relativement élevés. Aujourd'hui, le prix du mégabit au Liban s'élève à 16 % du PIB par habitant, contre 8 % à l'échelle régionale et 2 % aux Émirats arabes unis (EAU), selon les chiffres du LBSG. Il en résulte d'ailleurs un faible taux de pénétration d'Internet. « Il existe aujourd'hui près de 950 000 abonnés au Liban, contre 300 000 en 2000. Certes, il s'agit d'une croissance importante, mais elle reste de loin inférieure à la croissance de 920 % réalisée sur la même période à l'échelle régionale », a ainsi souligné Gabriel Deek, ajoutant que le nombre d'usagers d'Internet est passé en Iran de 250 000 en 2000 à près de 18 millions en 2007.
Pionnier en matière d'Internet dans la région, le Liban ne cesse en tout cas de perdre de son positionnement à ce niveau. Il ne figure plus d'ailleurs parmi les 50 meilleurs pays en termes de e-readiness, un indice élaboré par la Intelligence Unit du magazine The Economist, mesurant la capacité d'un pays à utiliser les technologies de l'information et de la communication (TIC) pour stimuler l'économie.
Pour les membres du LBSG, cela est notamment le résultat de l'absence d'une vision nationale pour le développement des services d'Internet au Liban, mais aussi de la non-application de certaines lois déjà en vigueur, notamment la loi n° 431 relative au secteur des télécoms. Celle-ci prévoit la libéralisation du secteur à travers, entre autres, une corporatisation de la compagnie Ogero, détentrice aujourd'hui d'un monopole de facto.
Les conflits d'intérêts - nombreux autour de ce dossier dont l'enjeu financier se chiffre à plusieurs centaines de millions de dollars - continuent toutefois de retarder l'application de cette loi.
Les membres du LBSG espèrent néanmoins sauver cette réforme essentielle des méandres de la petite politique. Après avoir obtenu en automne dernier l'appui des organismes économiques et lancé sur son site électronique (www.broadbandlebanon.org) un manifeste ayant récolté jusque-là 6 000 signatures, le groupe compte à l'heure actuelle procéder à un lobbying agressif auprès des divers cercles d'influence. Sa priorité : convaincre les responsables à inclure le dossier du Broadband dans la prochaine déclaration ministérielle.