Malgré le différend qui les oppose sur la question de la privatisation du secteur de l'énergie, Charbel Nahas et Marwan Iskandar sont d'accord sur la nécessité de procéder dans l'immédiat à une restructuration de l'Électricité du Liban (EDL), qu'elle soit privatisée ou pas dans un deuxième temps, pour pallier, par ailleurs, le problème de la dette publique. « Il existe en effet une relation de cause à effet entre les deux sujets. Le déficit chronique de l'EDL ne fait qu'enfoncer le clou de la dette publique », souligne Marwan Iskandar.
Selon ce dernier, le prochain gouvernement devrait œuvrer par tous les moyens en faveur d'une réduction des engagements de l'État, dont le montant total risque d'atteindre 50 milliards de dollars d'ici à fin 2009, soit environ 170 % du PIB. « Le service de la dette accapare aujourd'hui près de 45 % des recettes fiscales, ce qui constitue une entorse majeure à la croissance dans le pays. Or, le déficit de l'EDL représente à lui seul 40 % de ce service », explique-t-il.
Si l'État parvient à réduire à zéro le déficit de la compagnie nationale, cela permettra non seulement de freiner la hausse vertigineuse de la dette, mais d'élargir surtout le champ de manœuvre public au niveau des dépenses d'investissements, indispensables à la croissance économique, ajoute-t-il. La réduction du service de la dette passant également et surtout par un assainissement des finances publiques, le prochain cabinet est appelé à réduire ses dépenses et/ou à augmenter ses recettes, rappellent les deux économistes. Ils s'opposent toutefois à une augmentation des taxes, notamment la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) prévue à Paris III, pour réaliser cet objectif. « Depuis 1997, le taux de prélèvement a doublé au Liban », indique à cet égard Charbel Nahas, s'interrogeant sur la capacité du contribuable à supporter de nouveaux impôts. « La seule issue à ce problème est de relancer les investissements publics afin de créer une dynamique susceptible d'augmenter les revenus de l'État ou de réduire à moyen terme d'importantes factures sans pour autant léser le citoyen, explique-t-il. Investir dans un projet national de transport public permettrait par exemple de réduire la facture énergétique qui pèse lourd aujourd'hui sur les finances publiques. »
Cependant, il ne suffit pas de s'attaquer uniquement au service de la dette, estime Marwan Iskandar. « Certes, il s'agit d'un pas indispensable à franchir, mais la réduction du principal de la dette devrait également figurer parmi les priorités du prochain gouvernement. Pour cela, il faudra sans appel procéder à une privatisation des réseaux mobile et fixe ainsi que du secteur de l'énergie. Cette opération pourrait générer en effet 7 milliards de dollars et contribuer ainsi à la réduction du montant global de la dette à hauteur de 15 % », indique-t-il. Pour lui, l'exploitation des ressources hydrauliques du pays pourrait également contribuer à réduire le volume de la dette (voir par ailleurs).